Klang

Schenker se réfère plusieurs fois à ce qu’il appelle Klang ou Klang der Natur, le « son de la nature », le son complexe formé de ses partiels harmoniques (voir en particulier Harmonielehre, § 8 et suivants; Naturklang se trouve dans Der freie Satz, §§ 1, 7 et 9). Il ne cherche pas pour autant à doter la musique d’un fondement naturel, scientifique, il considère seulement que la série des sons harmoniques est un modèle, une suggestion, dont l’artiste s’est servi pour former les notes, les intervalles, les échelles et les accords. Il insiste sur le fait que si « les acousticiens ont su décrire le phénomène [des sons harmoniques] exactement et sans erreur, ils se sont par contre engagés sur une fausse piste lorsqu’ils ont essayé d’expliquer par là l’art et la pratique des artistes. […] Il faut donc considérer comme heureux que les artistes, plus assurés dans leur instinct que dans leur connaissance, se soient laissés guider par celui-là plus que par celle-ci. […] Mon but est donc d’interpréter et de mettre en évidence l’instinct des artistes et de montrer quel usage inconscient ils ont fait et ils font encore de la proposition de la nature, ainsi que ce qu’ils en ont par ailleurs laissé, et laisseront probablement toujours inusité » (Harmonielehre, p. 33).

Schenker montre ainsi que la musique ne fait usage que des notes et des intervalles correspondant aux cinq premiers harmoniques et à leurs multiples, rabattus en outre dans un ambitus réduit, et que les harmoniques correspondant aux nombres premiers à partir de du septième et à leurs multiples n’ont pas d’usage musical. Il souligne aussi que si l’accord parfait majeur reprend assez nettement le modèle proposé par la nature, l’accord parfait mineur par contre ne peut en aucun cas se justifier de la même manière, qu’il est intégralement le résultat d’une intention artistique (Harmonielehre, § 23).

Le Klang est donc une idée abstraite, que Schenker compare au moins une fois aux idées platoniciennes (Der Tonwille I, p. 23). Cette idée doit être objectivée, réalisée, pour devenir une œuvre musicale réelle. La structure originelle en est la première réalisation.

La conception schenkérienne du Klang a souvent été mal comprise, parce qu’on a cru que, comme la plupart de ses contemporains, il voulait décrire le fondement naturel de la musique. Une lecture plus attentive montre que ce n’est certainement pas le cas.

NM

Leave a comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *